lundi 28 septembre 2015

Trail des Aiguilles Rouges: une superbe journée!

J'ai décidé de m'inscrire au TAR peu après avoir opté pour une participation au Grand Raid de la Réunion: il me fallait une course de préparation, me permettant de me tester sans bâtons, sur un terrain raide et cassant, une course belle, me permettant de passer un bon moment, mais sans enjeu, afin que je ne sois pas forcée de me préparer spécialement. En effet, ayant repris un entraînement sérieux mi-septembre, il me semblait important de pouvoir bien charger les deux semaines suivantes, sans avoir à trop me reposer en vue d'une course.
Dans tout ça, j'ai un peu sous-estimé la fatigue induite par l'UTMB+ma rentrée+la famille, car je prends tout d'un coup conscience, la veille de la course, que je suis épuisée et que j'ai tout sauf envie de me tirer dessus. Mais le temps s'annonce beau, le parcours superbe et mon objectif premier est de me faire une sortie longue, donc je pars pour Chamonix en me fixant pour but de prendre un maximum de plaisir sans pression.
Je retrouve Helen Blatter, de Suisse, qui va me faire l'assistance, on est ravies de bavarder un moment. Quand le réveil sonne, je n'ai aucun entrain, ce que vont me confirmer mes premières foulées de mon maigre échauffement: j'ai l'impression que mon corps n'a aucune envie de se mettre en mode course et qu'il ne comprend pas ce que je lui impose.
Je m'étais exhortée à y aller cool, mais dès le départ, j'oublie toutes mes résolutions et je fonce comme si j'avais un animal à mes trousses: vu ma forme du jour, je suis asphyxiée avant même d'avoir quitté Chamonix. Je me fais doubler par des hordes de gens, dont Andrea, Marjorie, Delphine et Charlotte. Au bout de 3 km, je n'en peux plus, notamment parce que les gens qui me doublent ont tous l'air d'avoir un peu pitié de moi: je ne compte plus les "Allez Caro", "Allez numéro 1" (Eh oui, le dossard 1 est un peu lourd à porter quand on  n'avance pas..). Ce soutien est très gentil, mais je commence à avoir honte de moi. Me laissant momentanément dominer par mon égo, j'ai presque envie de jeter l'éponge, tant la honte me submerge. Mais il fait nuit noire, j'ai ma journée  pour moi, il fait beau, le parcours me plaît, alors je me dis que je serais bien bête, par fierté, de ne pas continuer, alors que je ne suis ni blessée ni malade. Tant pis si je finis loin derrière, l'essentiel est de prendre du plaisir. Je ralentis donc assez nettement le rythme et je me sens tout de suite mieux. C'est donc à une allure confortable que je monte vers l'Index et je savoure les paysages éclairés par la pleine lune. Au bout d'un moment, je cesse de perdre des places et commence à en gagner. Derrière moi, un long serpentin de frontales me rassure sur le fait que, contrairement à mes craintes, je suis assez loin de la dernière place.
A l'Index, Helen m'encourage et me donne une flask. Comme il fait un froid de canard, je bois peu et mange encore moins. Peu avant le Col Cornu, l'aube se lève, dans un paysage d'une beauté renversante. S'ensuit une traversée assez périlleuse au-dessus du superbe lac Cornu: les pierres sont toutes gelées. Je double alors pas mal de concurrents, un peu moins à l'aise dans ces terrains pierreux.
Dans la descente qui suit, je constate que, quand le souffle manque, ce n'est pas seulement gênant en montée mais aussi en descente: là aussi, je suis obligée de ralentir un peu par rapport à mon rythme habituel.
Dans la montée vers le Col du Brévent, je rejoins Marjorie, qui est alors 2e féminine. Après un court passage sur de la neige un peu gelée, on attaque une longue descente au cours de laquelle je vais passer 2e. S'ensuit une montée en pente douce (dans laquelle je suis peu capable de courir, à mon grand regret), vers le refuge de Moede-Anterne, éclairé par une lumière incroyable.


Passer au soleil est merveilleux, après plus de 4h dans l'ombre. Le spectacle de la mer de nuages ainsi que des sommets baignés de soleil est fantastique. Entre Moede-Anterne et le début de la descente sur Servoz, les chemins sont féériques et je suis extrêmement contente d'être là. Je peine d'ailleurs à m'exhorter à aller vite, car je rentre plus dans un état contemplatif que compétitif.
La descente sur Servoz est longue et superbe: je m'amuse beaucoup, tout en mangeant une poignée de fruits secs. J'ai plaisir à retrouver Helen, toujours souriante et sympathique.

Comme toutes les bonnes choses ont une fin, j'appréhende un peu la longue remontée vers le Prarion. Elle est d'autant plus longue qu'elle a été rallongée d'un km par rapport à 2012.
Finalement, cela passe bien, sans doute parce que le rythme que je m'impose n'est pas très rapide. Je découvre aussi que, mener une course un peu en dedans est quand même beaucoup moins dur - mentalement et physiquement - que mes courses habituelles, au cours desquelles je me fais vraiment violence.

L'arrivée au Prarion est superbe, comme toujours. 

Mes jambes ont un peu de mal à s'habituer à la descente qui suit et mes genoux grincent un peu, mais une fois lancée, tout se passe bien et j'apprécie vraiment la descente qui suit jusqu'aux Houches. Faire encore le tour du lac m'apparaît comme un peu superflu, mais je m'y prête de bonne grâce et me voilà enfin à l'arrivée, pas fière de moi mais contente de cette belle sortie!


J'ai sans doute pêché par optimisme en pensant que je pouvais m'entraîner dur pendant une semaine, puis prendre le départ d'une course en étant alerte et rapide. Certains peuvent le faire, pas moi. J'ai mesuré durant cette course combien la fraîcheur physique est importante et pas seulement en montée: je me suis sentie moins dynamique, moins agile, moins légère que d'habitude. C'est une bonne expérience en vue de la Réunion et de mes autres courses importantes.
Un immense merci à Helen, à ma famille et à tous ceux qui me soutiennent. Et un très grand bravo à tous les coureurs qui ont eu la joie de participer à cette course, et en particulier à Andrea, qui était bien la "patronne" ce jour là!




lundi 20 juillet 2015

Eiger Ultra Trail: quel parcours!

Trois semaines entre deux ultra, c'est peu, surtout quand ces trois semaines coïncident avec le début de mes vacances d'été, qu'il fait un temps fabuleux, peu propice à rester vautrée dans un canapé (ce qui, de tout de manière, n'est pas trop le genre de la maison, vous l'aurez compris :-) ).
Entre une série de sorties de vélo "de récup", une longue reconnaissance de l'UTMB et une suite de belles sorties (toujours censées être courtes, mais toujours plus longues que prévu) dans le Val d'Aoste, je finis par constater, quatre jours avant la course, que je suis plutôt fatiguée et que mon tendon d'Achille droit est douloureux. L'avant-veille de la course, je constate que mon coeur bat à 48 puls/mn au repos, contre 32 avant les mondiaux! C'est mauvais signe, mais bon, je me trouve plein d'excuses (la chaleur, le stress, etc..) et je reste très confiante puisque c'est bien connu, en ultra, c'est dans la tête que ça se joue :-) Non, trève de plaisanterie, je me dis que, c'est sûr, je n'aurais clairement pas mes chances sur une course de 20 km, mais que, sur la longueur, même si la forme physique générale n'est peut-être pas au top, il y a tellement d'autres paramètres qui rentrent en ligne de compte que cela peut bien se passer quand même, d'autant plus que, le footing de veille de course me rassure beaucoup: les muscles sont détendus, je me sens légère et dynamique, bref tout va bien!
Ce qui nous attend
Arrivée à Grindenwald, j'ai la mauvaise surprise de constater que la plupart des routes que j'avais repérées sur la carte pour rejoindre les postes d'assistance sont fermées à la circulation et que, la seule solution est d'emprunter les remontées mécaniques, solution qui me paraît trop compliquée pour être improvisée à la dernière minute et aussi trop onéreuse. J'appelle donc Julien, qui devait venir depuis Strasbourg dans la nuit pour m'assister et le dissuade de venir, me sentant vraiment trop de scrupules à lui imposer des heures de route pour aboutir à une probable grosse galère une fois sur place, à se stresser pour rejoindre ces postes d'assistance en train ou en télécabine.
Il est alors 17h, et il me reste peu de temps pour essayer de trouver une solution pour me passer d'assistance tout en me ravitaillant au mieux. Après un bref regard déprimé à tous les bons muffin spéciaux que je m'étais préparés exprès pour l'occasion, ainsi qu'à tous mes sticks de boisson énergétique hydrixir goût citron qui me conviennent si bien, je comprends qu'il est carrément impossible que j'emmène tout avec moi, sous peine de me transformer en sherpa.
Je n'emmène finalement que 2 muffin et un peu de boisson, décidant de prendre le risque de me servir des boissons et aliments fournis par l'organisation. Toutes ces réflexions me stressent un peu et, une fois n'est pas coutume, je ne trouve pas le sommeil avant 23h, si bien que je peine à me réveiller à 3h30. 
A 4h30, c'est parti! Après quelques km, je prends vite la tête de course, m'efforçant de courir détendue, de bien respirer et d'économiser mon énergie. On s'élève rapidement en direction des crêtes, le paysage s'annonce superbe et la journée est belle. Le début est plutôt roulant, la première descente se faisant d'ailleurs carrément sur une route bien raide. En bas de cette route, je suis rejointe par Mercedes, coureuse espagnole avec laquelle j'avais déjà bien lutté à la CCC 2013.
Je mets donc un sérieux coup d'accélérateur dans la montée suivante, ce qui me permet de doubler pas mal de monde. Le parcours devient plus technique, les sentiers étroits et caillouteux, je commence à bien m'amuser. Dans cette première section de course, durant laquelle les vues sont somptueuses (On voit parfois l'Eiger sur notre gauche et les lacs de Thun et Brienz en contrebas), il y a toute une série de chemins traversants de toute beauté: ludiques, techniques, bref, je suis très contente d'être là.
Au Faulhorn, point culminant de la course, je rejoins Christophe Le Saux, qui m'encourage gentiment, puis j'attaque la superbe descente qui suit en compagnie de Freddy Thevenin et d'un autre coureur, avec lequel je vais d'ailleurs cheminer très longtemps.
Plus loin, on entame la longue, raide et cassante descente qui nous mène à mi-parcours, à Burglauenen. J'ai déjà les cuisses en feu et ma douleur au tendon d'Achille devient plus forte, mais le moral est bon. Seul problème: à improviser mes ravitaillements, je mange beaucoup moins que prévu et, je réalise à Burglauenen (52km/3200mD) que, en 6h15 de course environ, j'ai dû manger un muffin et une banane +2-3 coca et 1,5 l de boisson énergétique. Je m'enjoins alors fermement à me servir à chaque ravitaillement.
A la sortie du ravitaillement de Burglauenen
La 2e partie de course commence par une longue montée, qui se passe assez bien, même si, en arrivant en haut, je commence à être proche de vomir. Heureusement, je parviens à manger une banane, ce qui fait instantanément disparaître ce sentiment de malaise. On se rapproche gentiment de l'Eiger, mais par des chemins éprouvants, qui ne cessent de monter raide... et de descendre raide. Dur... dur. Le malaise me reprend 2 heures plus tard, alors que je monte une superbe crête de moraine qui longe l'Eiger. 
On passe par là! (Le sentier que l'on voit sur la droite)
J'ai vraiment besoin de manger car, la boisson énergétique fournie par l'organisation ne me convient pas, si bien que cela fait un moment que je tourne à l'eau. Heureusement, cette montée superbe mais assez terrible fait place à une descente magnifique, ce qui fait que, passé les premiers hectomètres durant lesquels les jambes étaient plus que flageolantes, je me sens bien. Malheureusement, le ravitaillement suivant n'est qu'un ravitaillement liquide et je ne peux avaler qu'un coca, en espérant que son sucre suffira à me nourrir. Je me hâte donc de rejoindre le ravitaillement d'après, que je pense être tout en bas de la vallée, avant la dernière montée. Mais arrivée au terme de cette interminable descente de 1500 mètres de D, je constate que le ravitaillement est au moins 2km plus haut! Argh! Mais j'ai besoin de manger, moi!!
Si je fais le compte, j'en suis à plus de 11h de course et ma dernière 1/2 banane a été avalée près de 3 heures auparavant. Cela fait un peu juste et je regrette amèrement de ne pas avoir été plus prévoyante en emportant une ration de secours. 
La montée vers l'avant-dernier ravitaillement se passe finalement plutôt bien, malgré une envie de vomir de plus en plus insistante. Mais le chemin est superbe, passant par des gorges somptueuses. Cela fait plusieurs heures que je n'ai plus aperçu le moindre concurrent et je peine à me motiver pour vraiment relancer lorsque la pente le permet. Je sens bien que je pers du temps, à marcher là où je devrais courir mais c'est peine perdue, je n'arrive pas à me faire violence et j'ai aussi les jambes et surtout le tendon d'Achille trop douloureux pour conserver une foulée dynamique.
Dans la dernière portion
L'avant-dernier ravitaillement, que j'atteins presque les larmes aux yeux tellement j'ai envie de manger.... n'est qu'un poste liquide!
Bon, et bien il ne reste que 2km avant le suivant, cela devrait aller, d'autant que le chemin est superbe et ombragé. Mais il est quand même raide et je n'avance plus! J'enlève ma musique, écoutée sans interruption depuis le départ, pour essayer de ne pas trop m'endormir, mais cela devient dur. 
Au ravitaillement suivant, je crois avoir suscité quelques regards étonnés lorsque je me jette sur le coca et une demi-banane comme une sauvage. Enfin! Lorsque je repars dans la descente finale, j'ai mal au ventre et je titube sur la piste. Je me moque un peu de moi-même, en me disant que je dois faire peine à voir.
Un ou deux km plus loin, cela va beaucoup mieux et je retrouve une foulée à peu près normale, ce qui me permet d'arriver finalement assez vite en bas de Grindenwald. Une courte mais raide montée et me voilà enfin à l'arrivée, heureuse et émue. Je m'étais fixée une arrivée en 13h et je termine en 12h45, donc l'objectif est plus que rempli, malgré les difficultés du jour.

En conclusion, je suis vraiment ravie d'avoir participé: le parcours est magnifique et, quoiqu'on m'en avait dit avant, il est largement assez technique et difficile pour moi, vraiment un cran au-dessus de la CCC, par exemple. L'organisation est au top. Quand à moi, j'ai encore appris beaucoup sur moi-même et pris la mesure de l'importance de bien se ravitailler et de bien connaître le parcours. Encore une fois, merci à tous ceux qui me suivent, me soutiennent et m'encouragent. Je vous dois beaucoup!

lundi 29 juin 2015

Lavaredo Ultra Trail: Ma meilleure course?

Cela faisait des années que je rêvais d'aller dans les Dolomites. Mais parfois, entre ce que l'on veut et ce que l'on peut, il y a un certain décalage. J'aurais bien aimé pouvoir prendre une grosse semaine sur place pour préparer au mieux ce LUT et profiter de la région, mais malheureusement, je travaillais jusqu'à mardi midi. C'est donc mardi soir, après un voyage assez épique (orage monumental, bouchons, et même un glissement de terrain à 5km de Cortina) que nous arrivons sur place, dans un charmant hôtel familial, l'hôtel Menardi, où malgré l'heure tardive, nous sommes accueillis chaleureusement.
Le mercredi, je découvre le paysage époustouflant qui nous entoure, sous un soleil radieux. Mon mari me dépose au refugio Gallina, qui sera le km 95 du parcours, dont je souhaitais reconnaître les 26 derniers km. Les paysages et la lumière sont incroyables et c'est donc sur un rythme bien tranquille, entrecoupés de multiples pauses pour m'imprégner de la magie des lieux et admirer les multiples marmottes dont je croise la route, que je rejoins Cortina. L'après-midi est un vrai supplice, puisque je n'ai qu'une envie, celle de parcourir une des multiples via ferrata qui surplombent Cortina.
Le jeudi, je parcours les 16 premiers km de la course, ce qui là aussi me prend un certain temps. Quand je rejoins le refugio Ospitale, où je dois récupérer mon vélo pour retourner à Cortina, je me sens assez fatiguée et commence à me demander si je n'en fais pas un peu trop, pour une veille de course. L'après-midi est donc vraiment tranquille et je ne m'attarde pas à la remise des dossards. Le vendredi, jour de la course, commence par une courte mais incroyable ballade autour des Tre Cime, avant d'aller siester une bonne partie de l'après-midi. Ensuite commence l'étrange attente, qui me semble interminable.
 A 22 heures, alors que je commence à être plus d'humeur à lire tranquillement ou dormir, il est temps de me préparer. C'est assez étrange, de sortir s'échauffer dans la nuit, à une heure où, habituellement, je dors déjà depuis un petit moment. De fait, je me sens toute molle, pas anxieuse ni nerveuse pour un sou, mais pas vraiment décidée à forcer, ce qui fait que mon échauffement se réduit à un vague trottinage désordonné. Je croise Brice, mon collègue de chez Hoka, et on se place ensemble au départ. Le speaker a beau en faire des tonnes, la foule nous acclamer, la musique tenter de nous émouvoir, je n'éprouve aucune émotion, aucun stress et peine à réaliser que je pars pour 119 km. Quand le départ est donné, j'ai d'ailleurs l'étrange sensation, sur le premier km, de courir comme si je prenais un tapis roulant à l'envers. Au bout de 500 mètres, Nathalie Mauclair est déjà plus de 100 mètres devant moi, au bout d'un kilomètre, je ne la vois même plus. 
Lorsqu'on attaque la première côte, j'ai enfin la sensation de réintégrer mon propre corps et de pouvoir être à l'écoute de mes sensations. Durant la première ascension, je me sens d'ailleurs de mieux en mieux, si bien que, quand on attaque la belle descente qui suit, je ne peux m'empêcher d'aller à fond, juste pour le plaisir. 8km de pistes plates ou montantes plus loin, on arrive au refugio Ospitale, où est situé le premier ravitaillement. Adrian Perez, mon fantastique assistant, m'annonce 5 mn de retard sur Nathalie. Je suis un peu surprise que l'écart soit si important, car je n'ai pas trop traîné en route.

S'ensuit une longue ascension, suivie de superbes morceaux de descentes, jusqu'au second ravitaillement de Federavecchia (KM33). Je dépasse régulièrement des concurrents et me sens bien, tout en veillant à ne pas m'emballer et à conserver une allure fluide et détendue. On m'annonce 6 mn de retard, ce qui me surprend un peu car j'ai vraiment l'impression d'avoir bien avancé sur cette portion. Je me dis que Nathalie est sans doute dans un grand jour et que, ma foi, si elle est meilleure, tant mieux pour elle et que je dois juste gérer ma course en écoutant mes sensations propres et sans me laisser affecter par quoi que ce soit. Le chemin en direction du refugio Auronzo (km48) est juste incroyable, alternant petits sentiers ludiques, et belles portions de montées. Avec une belle musique dans mes oreilles,  en pleine nuit, je suis au paradis et souhaiterais d'ailleurs que le jour ne se lève jamais. Arrivée à Auronzo, on m'annonce 1mn de retard sur Nathalie... et bientôt, je la rejoins. 

L'aube se lève et on peut profiter des Tre Cime qui nous surplombent, il fait bien frais, c'est magique. Mais je tergiverse un peu: dois-je doubler Nathalie, au risque de reproduire la situation des mondiaux, durant lesquels je menais la course sans jamais connaître les écarts avec elle et m'étais fait reprendre sur la fin, ou dois-je me caler sur son allure et m'économiser pour la doubler plus loin? J'hésite un peu, et puis en voyant qu'elle commence à marcher dans une montée que je me sens largement capable de courir, je la dépasse, puis accélère pour essayer de creuser l'écart. Durant les 10 km de descente qui s'ensuivent, je suis à bloc et dépasse au moins 4 ou 5 concurrents, dont Freddy Thevenin, le sympathique coureur de la Réunion, qui me sauve la mise en m'évitant une trop sérieuse erreur de parcours, lorsque je m'engage dans la mauvaise direction.

S'ensuivent 6 ou 7 km de piste plate et monotone, qui m'entament sérieusement, d'autant plus qu'ils précèdent une montée qui a juste, à mon goût, la mauvaise pente: trop plate pour marcher, trop raide pour courir facilement. Je m'efforce de courir, ou au moins d'alterner marche et course, si bien qu'arrivée en haut, je suis fracassée et ai l'impression de ne plus savoir coordonner mes mouvements. Heureusement, la descente qui suit est facile et jolie et je retrouve progressivement de l'énergie. Au ravitaillement du 77e km, je suis à nouveau toute fraîche et motivée et m'apprête à attaquer une belle montée. J'ai dû mal lire le profil, parce que, en fait de montée, c'est une magnifique descente dans les bois qui m'attend. Elle commence assez mal, puisque, occupée à manger une banane, je ne regarde pas bien le sentier et me prend une gamelle assez violente, d'autant plus que, pour sauver mon repas, je ne me suis pas rattrapée correctement avec mes mains.
Sonnée, il me faut un peu de temps pour pouvoir marcher à peu près droit mais, persuadée que Nathalie est à mes trousses, je ne m'autorise pas de temps mort. Quelques km plus loin, on entre en bas du Val Trevenanzes, et je sais qu'une montée de 1000m sur près de 10km nous attend. Le paysage est grandiose, mais, petit à petit, je me sens de plus en plus mal. J'ai soif, mais en même temps, j'ai l'impression de me gorger d'eau; ma banane est loin, mais rien que de penser à manger, j'ai envie de vomir... envie qui commence à devenir insistante!
Je décide alors d'essayer de me déconnecter mentalement de mon effort et je me mets à penser à tout et à rien, au livre que je lis, à mes enfants, à des recettes de cuisine.. Cela ne marche pas si mal et, progressivement, l'envie de vomir s'atténue. Par contre, le sentier est quand même pénible, puisqu'il parcours longuement un lit de rivière, rivière que l'on franchit d'ailleurs régulièrement. A force, je finis évidemment par atterrir à pieds joints dans l'eau, puisque, n'ayant pas envie de perdre du temps à chercher les bons passages pour traverser, je tente des sauts de plus en plus hasardeux. Au bout d'un moment, je crois être arrivée au col, enfin! Youpi, la fin est proche! Mais Argh! en fait de col, c'est juste un tournant, et la vallée continue à perte de vue! C'est atroce!
Mais comme tout à une fin, je finis enfin par arriver au vrai col et à entamer la longue descente, entrecoupée d'une rude montée, qui me mène au Col Gallina. Je rattrape alors un concurrent, le premier depuis au moins 2 heures de temps. Au Col, je retrouve mon assistant et manque de pleurer de joie d'en avoir enfin fini avec cette galère. Enfin je vais pouvoir aborder la dernière portion du parcours: une petite montée de rien du tout, des beaux sentiers en balcons, ça va être super! Mais, à mon grand étonnement, on ne rejoint pas du tout la montée que j'avais parcouru en reconnaissance; au contraire, on part dans le sens opposé et on se met à descendre carrément franchement. Ouh, ça sent le roussi, ça! Ce qu'on descend, on devra forcément le remonter! Et effectivement, la "petite montée de rien du tout" se transforme en 500m de D+! Mais étrangement, plus je monte, plus je me sens en forme et, arrivée en haut, j'ai la bonne surprise de constater que je suis très à l'aise dans la descente qui suit. 
Et là, enfin, on rejoint les sentiers que j'avais parcourus mercredi. Ils sont beaux, techniques et je m'amuse, toute étonnée de voir que, pour la première fois sur une course aussi longue, je n'ai ni mal de dos, ni mal de ventre ou de genoux qui m'empêchent de bien courir en descente! De nouveau, au Passio Giau (km 102), je suis toute émue et manque de pleurer en voyant mon assistant. Je sais maintenant que je vais aller au bout de cette course. Je m'emballe un peu trop et, dans une descente raide, je manque de me prendre une chute monumentale et me rattrape de justesse! Je prends cela comme un avertissement et m'enjoins de me concentrer un maximum. 
Encore deux montées, dont une assez sévère, et je rejoins enfin la belle descente finale, durant laquelle je rattrape encore un concurrent dans les parties techniques. Mais me voyant arriver, il pose une belle accélération sur les pistes vallonnées qui nous amènent au-dessus de Cortina et je n'ai pas du tout le coeur de me bagarrer pour une place. La fin est rude, puisqu'on remonte un peu pour aller rejoindre le haut de la ville. Une fois en ville, je suis de plus en plus émue et portée par les encouragements chaleureux des gens. Une courte remontée et c'est enfin l'arche d'arrivée! J'apprends alors que, avec mes 13h40'34'', je ne suis qu'une heure et 5 mn derrière le gagnant du jour (8%) et que je me place 10e au scratch. Je n'en reviens pas! J'attends Nathalie pour la féliciter, sans me rendre compte que de rester ainsi au soleil, assise sur mon banc, m'épuise et je vais d'ailleurs le payer assez cher au cours de l'après-midi puisque je me sens incroyablement mal: je suis bientôt incapable de rester assise, de boire ou de manger. Heureusement, ça finit par passer et, le soir, je suis capable d'aller savourer une bonne pizza!

En conclusion, je dirais que, plus je fais de l'ultra, plus je réalise que c'est un effort incroyablement mental: il faut être capable de se tirer dessus, de résister constamment à l'envie de marcher au lieu de courir/de s'accorder un moment de répit/de s'asseoir un petit moment pour souffler. Je crois que c'est surtout cet engagement mental qui est épuisant et qui fait qu'il est difficile de courir trop d'ultra dans une saison.

Enfin, un immense merci à tous ceux qui me soutiennent et en particulier à mon fantastique assistant Adrian Perez! Merci aussi à vous lecteurs, si vous avez pu venir à bout de mon long récit sans vous endormir :-)



lundi 1 juin 2015

Vice-Championne du Monde!

Alors que, jusque là, les mondiaux ne tenaient pas une grande place dans mon esprit, j'ai commencé à y penser nuit et jour dès le début du mois de mars. De fait, jamais je ne m'étais préparée ainsi pour une couse, tant au niveau des charges d'entraînement que sur le plan de mon hygiène de vie, qui est devenue quasi monastique à partir du mois d'avril :-)
De fait, toute cette préparation, si rigoureuse, a commencé à devenir pesante et il me tardait que le jour J approche.
Les jours précédant le grand événement, j'étais partagée entre confiance et appréhension, car je craignais un coup du sort de dernière minute, comme l'infection qui m'avait coupé les jambes aux Templiers fin 2014. Mais la veille de la course, je suis pleinement rassurée puisqu'il me semble être en forme!
C'est donc assez détendue que je vais me coucher tôt, pour un réveil plein d'enthousiasme vers 1h45. Après un bon échauffement, je suis fin prête sur la ligne de départ.
Très concentrée, je suis "dans ma bulle"

Au départ, je reçois des gravillons dans les yeux et manque de chuter. Je me reprends, un peu groggy, et m'efforce d'être à l'écoute de mes sensations pour trouver la juste limite entre le trop vite et le trop lentement.
La montée au Semnoz se passe bien, je suis plus ou moins avec Anne-Lise et Nathalie. Au sommet, je constate que j'ai plus de 8 mn d'avance sur mon temps 2014! Je suis réjouie mais sais que le plus dur reste à faire! Ravito express, je prends les bâtons, pose la frontale (Après un peu d'hésitations car il fait sombre) et entame la descente. Je ne tarde pas à doubler Anne-Lise mais nous allons rester au contact encore 5 ou 6 bons km. Nathalie est juste derrière moi. Dans la montée de la Cochette, je creuse un peu l'écart: je pense que mes bâtons sont un bel avantage, car les chemins sont parfois boueux! Jusqu'à Doussard, la course se passe très bien, même si j'aurais souhaité attaquer plus en descente; mais je crains une chute fatale, donc je reste prudente.
A Doussard, contente de constater que j'ai 20mn d'avance sur mes temps 2014!
A Doussard, Pascal Balducci m'annonce que je n'ai que 2 mn d'avance sur Nathalie. Je prends donc moins de temps que prévu pour me ravitailler et fonce vers la montée de la Forclaz. Cette montée se passe au mieux, puisque je cours quasiment tout du long. (Je vais d'ailleurs creuser un peu l'écart, qui passe à 4mn). A Montmin, je rejoins Sangé Sherpa, qui m'encourage gentiment. On va se suivre un bout de temps. Je me sens toujours bien mais suis moins tonique sur les relances: je le vois bien puisque Sangé me distance toujours à ces moments là, tandis que je le rattrape dès que la pente s'élève. Mon premier "coup de barre" arrive sous le col des Frêtes. J'ai un peu mal au ventre et la tête qui tourne. J'appréhende donc la descente qui suit. Elle se passe finalement plutôt bien mais je me rends bien compte qu'elle ne me permettra pas de creuser l'écart. De fait, c'est dans les pistes larges et vallonnées qui mènent à Menthon que Nathalie va combler son retard; je perds une précieuse minute à remplir de l'eau et à faire une pause-pipi et c'est ainsi que, lorsque je sors du ravito de Menthon, j'aperçois Nathalie qui rentre. 
Je fais l'erreur de trop me charger en eau et peine à relancer et c'est ainsi qu'elle me double un peu avant Bluffy. Je suis anéantie!
Sous le choc, alors que je viens de me faire doubler

De fait, Nathalie réalise un superbe coup de bluff puisqu'elle accélère prodigieusement, me donnant ainsi l'impression que je n'ai aucune chance de la suivre, alors qu'une fois hors de vue, elle va bien ralentir l'allure. Belle leçon de tactique de course!
J'essaie de rassembler toutes mes forces physiques et morales pour continuer à accrocher la victoire mais, la fatigue n'aidant rien, je n'y arrive plus. Le coeur n'y est plus.
La montée au Veyrier ne me paraît pas trop longue, même si je suis dans une sorte d'état dépressif. On m'annonce près de 4mn d'écart au sommet. Je m'efforce de rassembler toute mon énergie physique et mentale pour faire une belle descente.
Concentrée et fatiguée, je n'ai pas le temps d'apprécier le panorama :-)
Malheureusement, à peine la descente commencée, une douleur au dos apparaît, qui me gêne beaucoup. Puis ce sont les vertiges. J'opte alors pour la prudence: vaut mieux finir 2e que ne pas finir du tout!
Arrivée au lac, mon voisin m'annonce 1'35 d'écart sur Nathalie. Abattue, épuisée, je termine lentement et finalement, je suis à 2'22.
Enfin l'arrivée!

A l'arrivée, je suis partagée entre joie et abattement. Joie de ce titre de Vice-Championne du monde, de ce chrono incroyable (42 mn de mieux qu'en 2014; soit-dit en passant de quoi monter sur le podium masculin de la Maxi-Race open).
Mais aussi beaucoup de déception: 2 petites minutes et c'est le titre mondial qui m'échappe, alors que je commençais à y croire. Je sais aussi que, dans le monde du trail, on ne parle bien souvent que de la première fille et que ces 2 mn vont faire toute la différence.
Avec la championne du jour, qui m'a impressionnée par sa ténacité. Bravo Nathalie!

Lorsque j'accueille l'espagnole Maité Mayora Elizondo, que j'admire depuis longtemps pour ses belles performances, je suis touchée par ses larmes de joie.
Le podium du jour
Plus tard, viendront les podiums avec un beau titre par équipe.


Au final, je pense que j'ai accompli une course exceptionnelle, repoussant un peu plus loin mes limites physiques et mentales. J'ai appris beaucoup sur moi-même et suis heureuse d'avoir eu la chance de vivre de pareils moments!
Un immense merci à Luc, mon mari, pour son soutien sans faille, à mes enfants qui m'apportent leur énergie et leur joie de vivre, à mes parents, pour les mêmes raisons, à Philippe Propage pour avoir été tout simplement formidable, à Pascal Balducci pour ses conseils avisés et à Hoka, pour le soutien matériel et moral!

dimanche 17 mai 2015

Ma petite cuisine sans gluten et sans lactose..

J'aime beaucoup cuisiner. Bon, il faut bien avouer que c'est souvent usant de trouver le temps, les idées et les ingrédients pour nourrir 5 personnes sans y passer sa journée et que l'on se rabat régulièrement sur des menus simples du style polenta/salade, pâtes/salade, riz/salade, soupe etc.. Par contre, j'attache beaucoup d'importance à la qualité des produits et, même si ce n'est pas donné de nourrir 5 personnes tout en bio et avec une quantité non négligeable de produits frais par jour, on y tient! Et c'est sûr que ce n'est pas chez nous que l'on trouvera des plats tout préparés ou du pain et des desserts achetés à la boulangerie.

Car j'ai aussi la chance d'avoir un mari qui aime beaucoup cuisiner (et qui rate moins souvent ses plats que moi car LUI se sert d'une balance et mesure au gramme près ses recettes alors que moi, j'improvise et suis physiologiquement incapable de suivre une recette à la lettre sans décider que, non, finalement, je vais changer tel ingrédient pour tel autre et modifier de fond en comble les proportions:-))

Ce que j'aime surtout cuisiner, ce sont les desserts et il ne se passe rarement plus de 5 jours sans que j'essaie une nouvelle recette, y compris pendant les périodes durant lesquelles je suis censée m'affûter et surveiller mon poids. On ne se refait pas -:)
Concernant le sans gluten et sans lactose, c'est venu petit à petit. On n'a pas supprimé totalement le gluten de notre alimentation, mais à la maison, à part des pâtes complètes à l'épeautre de temps à autre, on fait sans; par contre, si on est invités ailleurs, on en mange volontiers. Et cuisiner sans gluten et sans lactose est devenu pour nous un jeu, un petit défi culinaire, pour nous permettre de faire des recettes délicieuses en variant un peu les goûts par rapport aux plats classiques.
Pour les desserts, ce n'est pas très compliqué, en fait. Il suffit de remplacer le beurre par de la crème ou du lait de riz, de la purée d'amandes ou de noisettes (ou de la pâte de pistaches, de noix de cajou ou n'importe quel oléagineux)... 
Quand à la farine de blé, n'importe quelle autre farine fait aussi bien l'affaire et, souvent, je fais des mélanges (riz/châtaigne, riz/maïs/châtaigne, ou même riz/maïs/sarrasin/châtaigne) et cela marche très bien.
En général, je remplace le sucre par du sirop d'Agave, à l'index glycémique beaucoup plus bas et de réduis largement les quantités de sucre car la plupart des recettes sont trop sucrées à mon goût.

Bon, assez parlé. Voici les recettes:

Pour le gâteau. C'est un gâteau à 3 couches. 

Couche 1: Chauffer le four à 210°. Mélanger 300 g d'Amandes complètes en poudre, 80-100g de sucre ou de sirop d'Agave et 4 blancs d'oeufs. Faire cuire ce mélange dans un plat à gâteau rond pendant 15-20mn (jusqu'à ce que cela roussisse un peu)

Couche 2:  Faire fondre 100g de chocolat noir avec 100g de Pralin (qu'on peut acheter tout fait en magasin bio ou faire soi-même en faisant rôtir à la poêle des petits morceaux de noisette et du sucre roux). Etaler en couche fine sur la couche 1.

Couche 3:  Faire une mousse au chocolat. Pour moi, c'est 200g de chocolat noir avec 4 oeufs. Séparer les blancs des jaunes, monter les blancs en neige. Puis mélanger les jaunes (pas trop froids!!) avec le chocolat fondu. Puis incorporer le blanc. Etaler sur la couche 2.

Laisser le tout au frigo puis déguster. Ce n'est pas très léger! 

Pour le pain

C'est mon cher et tendre qui a trouvé et perfectionné la recette de base. Il réussit d'ailleurs en général mieux le pain que moi :-) A partir de cette recette, on peut varier à l'infini, en modifiant les farines, en ajoutant des graines, ou des oeufs, ou des purées d'oléagineux ou du beurre pour briocher, bref, c'est juste une base. Il faut faire attention au moule dans lequel on cuit le pain. L'idéal est un moule à cake en 2 morceaux démontables.

500g d'eau tiède
1 sachet de levure sans gluten 
fouetter longuement la levure et l'eau pour faire démarrer la levure.
100g minimum de fécule de pomme de terre (Important pour lier le pain!)
400g d'autres farines (riz, maïs, sarrasin, châtaigne selon les goûts)
Sel
40g de sucre ou sirop d'agave pour que la levure prenne mieux)
Ajouter selon les goûts: 
-graines (lin, courge, noix, sésame, noisettes, amandes..)
-Beurre ou purées d'oléagineux pour briocher un peu
-1 ou 2 oeufs (pour briocher)
-Fleur d'oranger
-Plus de sucre ou d'agave si pain brioché

L'essentiel est d'aboutir à une texture assez liquide. Cela doit rester pâteux, mais pas trop, un peu comme une pâte à cake. Nous on fait tout au batteur et cela nous prend 10 mn maximum.
Verser le tout dans votre moule à cake un peu graissé. Attention, le mélange peut parfois beaucoup lever! Nous on met de l'alu à l'extérieur en prévention car on a eu des débordements.
Faire lever 1h40 à 40°. Puis cuire 35 mn à 210°. Attention, la farine de châtaigne noircit beaucoup, donc il ne faut pas se fier aux apparences.

Le pain est parfois un peu friable si il est tout frais. Le lendemain, c'est mieux. Nous on le garde 1 semaine en faisant cuire les tranches au grille-pain. C'est un régal.

Bon appétit!

dimanche 10 mai 2015

Trail court du Salève

Après le Nivolet-Revard, j'ai souhaité faire une course plus courte, histoire de vraiment travailler le cardio et la vitesse avant les mondiaux. Ce sont mes gros points faibles. Ce n'est d'ailleurs pas pour rien que je n'avais encore jamais fait de trail aussi court :-) Et je ne pense pas avoir vraiment un grand avenir dans la discipline :-)
L'avantage des trails courts, c'est qu'ils ne démarrent pas trop tôt et on peut prendre un peu plus son temps le matin; c'est donc tranquillement et sans stress que je me rends à Etrembières. A l'échauffement, mes jambes sont un peu lourdes. Je n'ai rien fait la veille, mais la semaine a été bien chargée, avec notamment 100 km et 2000mD+ de vélo le mercredi et plusieurs séances de fractionné.
Je me trouve un peu trop détendue et entame un petit dialogue intérieur pour me persuader qu'il va falloir vraiment partir vite et forcer car ici, pas question de gestion de course! A fond les ballons, sans se poser de questions :-)
Je me fixe pour objectif de boucler ces 20 km/1100mD+ en moins de 2h, ce qui me paraît un peu ambitieux compte tenu de mon niveau, mais bon, il me faut bien une petite motivation pour "me rentrer dedans" :-)
Dans le sas de départ, je ne vois quasiment que des gens sans eau et sans bâtons. Avec mon sac et mes bâtons, je me sens un peu décalée. J'ai déjà pris des petites habitudes d'ultra-trail :-)
Top départ. Après 800 mètres de route, on attaque directement par un single montant. On est en file indienne, à un rythme qui me convient bien. Après quelques km de traversée en légère montée, on rejoint le bas de la Grande Gorge. Je force tout ce que je peux sur mes bâtons mais je double quand même peu de monde. Je suis partie un peu vite et j'ai l'impression d'avoir le coeur qui va lâcher. Je ralentirais bien mais j'aperçois Manikala Rai pas trop loin derrière et suis donc obligée de continuer sur ma lancée. Heureusement, je trouve progressivement un rythme qui me convient mieux et la montée passe finalement assez bien. 
A ma grande surprise, je relance quand même bien sur le plat. On rejoint l'observatoire qui offre une superbe vue sur Genève et le Lac Léman puis on plonge en direction du Téléphérique. Cette descente, je crois que j'en connais chaque caillou puisque je la parcours quand même vraiment souvent. Je m'efforce donc de gagner un peu de temps et je constate que je reviens sur un homme en bleu qui m'avait un peu distancé dans la montée.
Mais une fois arrivée à sa hauteur, il pose une accélération et me distance d'un coup! On est déjà au Téléphérique et on va commencer une longue traversée en faux plat montant. J'ai l'impression d'être scotchée. Je ne suis pas trop essoufflée, les muscles ne sont pas douloureux mais impossible d'aller plus vite! Je constate cependant que je me rapproche petit à petit de l'homme en bleu et que je distance mes poursuivants. Enfin nous voilà de retour au-dessus de Grande Gorge! Vient la partie un peu pénible des sentiers herbeux des Crêtes du Salève (que même à l'entraînement je fuis comme la peste) avant, enfin, la récompense: la belle descente sur Orjobet. Mais alors que j'entame la descente, j'entends des pas qui se rapprochent. Pourtant, je ne fais pas semblant. J'accélère tout ce que je peux et, progressivement, plus la descente devient technique, plus je distance mon poursuivant et rattrape même d'autres concurrents.
On croise des hordes de promeneurs, la plupart se poussent mais d'autres semblent considérer qu'ils sont prioritaires et restent au milieu du chemin. C'est vraiment compliqué de zig-zaguer et, à un moment, je me prends une dame de plein fouet. Le temps de réaliser ce qui m'est arrivé, je suis 50 m plus bas et c'est trop tard pour m'excuser. Je me sens un peu confuse mais passe vite à autre chose car le sentier est étroit, technique, ludique et je suis suivie de près par mon homme en bleu que j'ai doublé auparavant.
Sur la fin, je m'amuse vraiment: cela tourne dans tous les sens, je fonce sans me poser de questions et, enfin, voici la route qui mène à l'arrivée. Il me reste 4 mn avant les 2h, ça va être juste! Je fonce et passe sous l'arche en 1h59 et 54 secondes, un peu plus de 14 mn après le premier et 16e au Scratch.
C'est sûr que ça change des trails de 10 ou 15 heures! J'ai même eu le temps de faire une sortie de vélo l'après-midi! Franchement, j'ai vraiment bien aimé l'expérience. Mais j'en ressors largement aussi fatiguée qu'après mes plus de 5h du Nivolet-Revard. 
Merci à l'organisation, qui était impeccable.

samedi 2 mai 2015

Un bon bain de boue au Nivolet-Revard!

En 2014, j'avais prévu de participer au Nivolet-Revard, mais un accident de vélo, survenu 3 semaines auparavant, m'en avait empêchée. Cette année, par contre, on avait prévu de partir en famille au soleil pour le week-end du premier mai, mais la météo annoncée nous a fait renoncer. Après plusieurs semaines chargées en entraînement et un peu de fatigue et de lassitude, j'ai réalisé jeudi matin que, si je ne trouvais pas le moyen de m'obliger à forcer un peu, je n'allais pas faire grand chose de mon week-end (sur le plan sportif). C'est là que m'est venue l'idée de participer au Nivolet-Revard. Un ou deux coups de fil, et me voilà inscrite! (Un grand merci aux organisateurs!)

Le vendredi, des pluies diluviennes s'abattent sur nos montagnes savoyardes, provoquant crues et inondations, au point que je vérifie plusieurs fois sur internet que le trail est bien maintenu. Cette journée du vendredi, je me sens incroyablement fatiguée et molle, au point que la courte ballade faite avec les enfants me paraît déjà longue! Le samedi, je baille à m'en décrocher la mâchoire pendant tout le trajet jusqu'à Voglans et peine à m'imaginer partir pour 51 km! Mais il fait doux et la pluie a cessé. Après un semblant d'échauffement, je retrouve les têtes connues sur la ligne de départ, dont Ludovic Pommeret, du Team Hoka, qui sera le grand vainqueur du jour. 

Et hop, c'est parti!

Je prends un départ relativement prudent, car mon objectif du jour n'est pas de "me mettre minable" mais plutôt de bien gérer ma course et voir si mon matériel est bon.

On commence par 5 km de plat/vallonné pour rejoindre les montagnes. Je ne suis pas mécontente de cette mise en jambes. Une fois la montagne rejointe, je suis un peu étonnée car je m'attendais à une montée toute raide; en fait, on emprunte des chemins vallonnés et boueux, mais assez ludiques et plaisants. Les pentes raides n'arrivent que peu avant le sommet. 

Au sommet du Revard, la vue est belle et les encouragements nombreux. Vient ensuite une partie que je n'ai pas du tout aimée, faite de champs détrempés, chemins ultra boueux, neige molle, le tout dans des forêts assez sombres et monotones.



Je prends le temps de remplir de l'eau et manger une banane à La Féclaz et constate que, lorsque je force un peu moins, j'arrive beaucoup mieux à m'alimenter. 

La montée vers la croix du Nivolet est nettement plus sympathique: on emprunte d'abord une piste assez raide avant de rejoindre un sentier technique en traversée. Après la croix du Nivolet, vient enfin une première vraie descente, car jusque là, j'ai surtout eu l'impression de monter ou de parcourir des faux plats. C'est technique, ludique et je m'amuse bien. Mais comme toutes les bonnes choses ont une fin, on doit remonter. On m'annonce encore 15 km jusqu'à l'arrivée et 2 km de montée. La montée commence doucement mais devient bien raide. J'ai du mal à tout donner pour forcer. Je suis toute seule, personne devant ni derrière et je me laisse un peu aller à traîner un peu. A l'approche de la descente, je vois que je suis en train de me faire rattraper par un concurrent que j'avais doublé auparavant. Cela me réveille et j'attaque la descente en mode "guerrière". Il y a quand même bien de la boue et mes bâtons sont précieux. Je manque d'ailleurs de me faire renverser par un coureur parti en toboggan dans la boue :-)

Mais encore une fois, après le ravitaillement sur lequel je dois encore m'arrêter boire (Il fait chaud et je me suis trop habillée), on remonte, ce que je vis comme une vraie punition.

Dans la descente raide et boueuse qui suit, on double les concurrents du 27 km et ce n'est pas toujours facile de passer. On arrive finalement en bas et on m'annonce 5 km jusqu'à l'arrivée. Les débuts, en plein soleil, sont un peu durs puis je me motive comme je peux en visant d'autres coureurs du 51 km qui ne sont pas loin et en tentant d'accélérer pour les rattraper. Je passe sur la moto de trial qui m'a crépi de boue au passage d'une flaque d'eau. La fin est dure, puisque viennent deux montées courtes mais abruptes, alors que je me tire la bourre avec les autres concurrents. Je force comme jamais mais un concurrent a plus de ressources que moi et me double. Mais je lui suis quand même reconnaissante car, sans lui, je n'aurais pas trouvé la motivation de forcer comme cela sur la fin. Je finis 15eme en 5h27, contente d'avoir encore réglé quelques détails matériels et alimentaires, qui me seront précieux sur la MaxiRace. Maintenant, je vais commencer à lever le pied.

dimanche 12 avril 2015

Les foulées de Gruffy: belle course ludique!

Juste après le trail des Glaisins, j'étais en train de me dire que cela ne me ferait pas de mal de faire encore quelques trails courte distance avant les mondiaux, lorsque je reçois un message de Lionel Baylot, un des organisateurs des foulées de Gruffy, qui me propose de prendre part au Trail Chéran Semnoz, toute nouvelle course organisée cette année: 25 km, 1400 m D+, parfait!


Je lui réponds avec enthousiasme. Mais au fil de la semaine, alors que, profitant de mes vacances, j'enchaîne les grosses sorties à vélo ou à pied, je commence progressivement à douter de mes capacités à venir à bout de cette course, d'autant plus que, la veille, on invite des amis et que je ne vais pas pouvoir me coucher aussi tôt que d'habitude. Cerise sur le gâteau, lorsque je me pèse (après deux mois à ignorer le pèse-personne) la veille de la course, je constate que j'ai pris plusieurs kilos (il me semblait bien que tous mes vêtements rétrécissaient :-)) et j'ai soudain l'impression d'être un vieux hippopotame fatigué plutôt qu'une coureuse affûtée.

Par contre, malgré ce peu d'optimisme quand à mes chances de faire quoi que ce soit de bien, je ne ressens rien du stress qui m'avait perturbé avant les Glaisins. Je crois qu'il fallait que je me lance sur une course courte et que, même si la course des Glaisins n'a pas du tout été une réussite, elle m'a au moins servi à me relancer, reprendre confiance et retrouver mes petites habitudes de course.

Le matin, j'effectue le trajet dans un semi brouillard comateux et peine à m'échauffer correctement. Il faut dire qu'il fait vraiment froid. Sur la ligne de départ, je croise Corail Bugnard, ma camarade de club, Sandrine Motto-Ros, qu'on ne présente plus ainsi que Lucile Besson, canadienne rencontrée aux Glaisins.

Le départ est assez roulant sur 5 km (120 m de D+ seulement), ce qui me convient parfaitement. J'ai besoin de me réveiller doucement! Je suis Romy (Salomon) et Corail. J'appréhende un peu les montées, mais finalement, lorsqu'on attaque enfin la première montée sur le Semnoz, je me sens assez bien. Je n'essaie pas de suivre Corail, par contre je double rapidement Romy. On alterne marche et course  et, au bout de 400 mètres de montée, on s'engage dans une descente facile sur une piste large. Je m'amuse bien et constate, en arrivant en bas, que je ne suis pas très loin de Corail (1mn environ). 

Vient une deuxième montée, plus raide, dans laquelle je constate que, parfois on va quand même plus vite en marchant qu'en courant. Je pensais être partie pour 500 mètres, mais au bout de 300 mètres, on attaque une descente qui devient de plus en plus raide et technique. Je regrette de ne pas avoir mieux lacé mes chaussures car j'ai quand même du mal à gérer ces pierriers instables recouverts de feuilles mortes. 

Arrivée en bas, j'aperçois Corail. D'après mes repères, elle est à environ 30 secondes. On traverse le Chéran, sur une belle passerelle et on rejoint un magnifique single qui longe le Chéran. En regardant ma montre, je constate qu'on n'a parcouru que 1000 m de D, et qu'il doit en rester donc encore environ 400! Mais je commence à fatiguer (Pourtant, on n'a fait que 16 km!). On monte, on descend, on tourne dans tous les sens et je force comme je peux pour rattraper Corail. Un peu plus loin, je constate que je me rapproche (environ 20 secondes d'écart). Je force tout ce que je peux, mais rien à faire, je ne la vois plus. 

Durant les 5 derniers kilomètres, je suis seule et un peu surprise de ne pas voir du tout Corail. Je me dis qu'elle a dû sacrément accélérer! Je suis impressionnée. Je suis aussi fatiguée (les cuisses se ressentent des grosses sorties de la semaine), mais les sentiers ludiques me plaisent beaucoup. On arrive enfin sur une route qui monte et on m'annonce l'arrivée à 1km. Je suis toute contente car je pensais qu'il en restait 3; pour une fois que c'est dans ce sens!! Je tente d'apercevoir Corail, en vain. 

L'ambiance à l'arrivée est incroyable, il y a énormément de monde. Aussitôt la ligne franchie, je cherche Corail pour la féliciter et partager mes impressions avec elle. Et c'est là que je la vois arriver derrière moi! En fait, elle a fait une petite erreur de parcours qui lui a coûté environ 1 mn, ce qui m'a permis de lui passer devant. Je suis contente d'avoir gagné mais aussi un peu déçue car j'aurais bien aimé batailler jusqu'au bout "à la loyale". Comme elle termine environ 1 mn derrière moi, je pense qu'on  se serait bien bagarrées sur la fin. Ce sera pour une prochaine fois!

En tout cas, je constate que j'ai enfin récupéré de la TransGranCanaria. Ca fait du bien. Un dernier mot pour recommander cette course, très sympa, avec une belle ambiance et des super organisateurs!

samedi 4 avril 2015

Trail des Glaisins: dur...dur!

Je tenais à participer au trail des Glaisins car j'éprouve une immense sympathie pour Jean-Marie Fontana et toute l'équipe de l'USMA 74, qui se démènent pour venir en aide à des enfants sévèrement handicapés ainsi qu'à leurs familles. De surcroît, l'organisation est bien rodée et le parcours ludique et technique. D'ailleurs, personne ne s'y trompe puisque cette course fait toujours le plein et est toujours bien relevée.

Les jours précédant la course, je suis bien nerveuse car je sens bien que je ne suis pas encore au mieux de mes capacités. Bien que je m'efforce de me détendre, je suis dans un état de nervosité extrême le matin de la course, au point que mes mains tremblent lorsque j'attache mes chaussures. J'ai beau me sermoner, me dire que c'est ridicule de stresser pour une course sans enjeu particulier, c'est mon inconscient qui prend le dessus..


Lorsque le départ est donné (départ que je manque de rater, toute absorbée par mes vaines tentatives pour retrouver un peu de sérénité), je sens vite que je ne suis pas dans le coup... la faute à ce stress imbécile qui me prive complètement de mes capacités. Comme tout le monde, je m'efforce de partir vite pour ne pas me retrouver bloquée lors des rétrécissements qui surviennent le long de la rivière. Alors que nous traversons le premier pont, je suis surprise de voir les coureurs continuer tout droit alors que les années précédentes, nous tournions à gauche. Je me dis que le parcours a dû changer cette année. 50 mètres plus loin, j'aperçois les autres filles devant moi qui font demi-tour... et je comprends que nous avons tous fait erreur! Catastrophe... car maintenant les plus lents sont devant! Et c'est parti pour plusieurs kilomètres de ralentissements, avec des gens qui doublent de partout, comme ils peuvent. 


A ce jeu de doubler n'importe où, puis de s'arrêter net derrière les bouchons, je m'épuise, je me stresse.. et je me dis que patauger dans la boue le nez dans le derrière d'inconnus, ce n'est pas mon truc. J'ai presque envie d'arrêter net et je me trouve aussitôt ridicule d'être si défaitiste. Vient enfin une montée plus large et je m'efforce de retrouver un bon rythme et une sérénité intérieure.

Je force comme je peux et, pendant un moment, je me sens bien. Mais sur les prés supérieurs du Mont-Lachat, je glisse dans la boue et me fais doubler par deux filles. Je regrette de n'avoir pas pris mes bâtons et je sens que j'ai trop forcé et que je m'épuise.
Vient enfin la descente, incroyablement boueuse. Je regrette encore plus mes bâtons, mais me dis que cela m'entraîne quand même la technique et l'équilibre. Tant bien que mal, j'arrive en bas et me décide enfin à vider mon surplus d'eau que je porte depuis le début. Avec la pluie et le froid, j'ai vraiment fait une erreur de me charger comme un chameau!
La seconde partie de course se passe mieux et j'arrive même à me faire plaisir dans certains bouts de montée et de descentes, même si mes chaussures commencent sérieusement à s'alourdir et à gêner ma foulée.
Arrive la dernière montée, qui se passe plutôt mal et durant laquelle je constate que mon effort du jour m'a bien entamée. Je rejoins comme je peux la ligne d'arrivée avec mes chaussures qui pèsent une tonne. Je termine 2eme, à 6 mn de Stéphanie Duc, énorme écart qui me laisse penser que je manque vraiment de tonus sur trail court et que je dois me reprendre en main d'ici les mondiaux.

lundi 9 mars 2015

TransGranCanaria 2015

Un long récit, à propos d'une longue aventure...
Cela faisait depuis la fin de la saison 2014 que j'avais décidé de participer à la TransGranCanaria. Depuis, j'ai beaucoup rêvé, pensé, ruminé, espéré, à propos de cette course sur laquelle je me suis cassée les dents en mars 2014, faute d'une préparation suffisante. Mais voilà, en janvier, je dois subir une opération sans gravité, mais qui m'éloigne de la course à pied pendant un bon mois. Vient ensuite un stage avec le Team Hoka à Madère, au cours duquel je prends tellement de plaisir à courir que j'en oublie toute prudence et me blesse à un genou et à un talon d'Achille.
3 semaines, deux séances chez l'ostéopathe et pas mal d'huile à l'arnica plus tard, me voici dans l'avion pour les Canaries, confiante quand à mon état de forme mais peu sereine quand à celui de mon genou.
Je passe une première nuit à Garanon, magnifique village de cabanes rustiques au milieu des forêts de pins,


puis vais me promener longuement dans le sublime parc national qui l'entoure. Suivent deux jours de rêve à l'hôtel Sheraton, avant, enfin, le départ tant attendu.

Les choses commencent assez mal pour moi puisque je commence par défoncer la voiture de location contre un poteau de béton, en voulant sortir pour rejoindre ma navette!
Dans la navette qui me mène au départ, je me sens assez émue. Il fait nuit, j'ai sommeil, et pourtant on est tous partis pour courir toute la nuit et une bonne partie de la journée du lendemain, quelle aventure! A Agaete, jolie petite ville qui abrite le départ, l'ambiance est incroyable. En 2014, j'avais d'ailleurs trouvé cela agressif, de débarquer là à une heure à laquelle je dors habituellement depuis longtemps, avec le bruit, la foule, le vent, la pluie...
Mais cette fois il ne pleut pas; au contraire, une sublime pleine lune nous éclaire; et je vis les choses très différemment puisqu'au contraire, je me sens portée par cette ambiance de folie.
Le départ est donné, sous les encouragement de milliers d'Espagnols survoltés. Ce qui est bien, avec ces ultras, c'est que cela part doucement. Pas de poumons qui brûlent, ni de souffle court, ça fait du bien!
Etrangement, je me retrouve en tête, ce qui n'est pas dans mes habitudes de début de course. Pourtant, je sens bien que je ne vais pas trop vite. Au bout d'un moment, Emilie Lecomte me dépasse assez rapidement. Dans la première descente, Nuria Picas me bluffe par son aisance et sa rapidité. S'ensuit une petite baisse de moral, due au fait que je me fais beaucoup doubler. La machine à douter se met en route, et les pensées négatives m'assaillent. Pour la première fois depuis que je fais du trail, je me décide à écouter de la musique.
L'effet est fulgurant! Les pensées négatives s'envolent et surviennent au moins 2 heures d'état de grâce, d'autant plus que, malgré la nuit, je me rends bien compte que les sentiers sont magnifiques. 
A Artenara (KM 35) m'attend Javier, mon assistant Canarien. Il est efficace, il m'encourage et je repars toute contente, jusqu'à ce que je me perde. Bêtement, je m'enferre dans mon erreur, espérant voir un balisage un peu plus loin. C'est alors que je me retourne et aperçois des frontales sur la montagne d'en face! 
Argh! Je suis consternée! Après avoir essayé sans succès de rejoindre le bon chemin à travers des jardins, je me décide à faire demi tour et pique un sprint pour rejoindre le bon chemin. Je me retrouve derrière un coureur que j'avais dépassé bien avant Artenara. Je suis furieuse et déprimée, d'autant plus que la douleur aux genoux se réveille et que je sens que quelque chose ne va pas au niveau intestinal. C'est le début d'une longue série d'arrêts derrière des buissons... en gros, à chaque descente, je perds une ou deux minutes à m'arrêter, jusqu'à ce que, enfin, au bout de 10 arrêts, je n'aie plus rien à évacuer (désolée pour ces détails scabreux :-) )
J'ai aussi souvent mal au ventre et donc mal au dos, ce qui s'ajoute à une douleur au genou qui devient intense. 
Je me raccroche à ma musique, pour tenter de rester positive, mais la fin de nuit devient difficile, d'autant plus que je fais encore 3 petites erreurs de parcours. (Le balisage était franchement excellent au début et à la fin mais vraiment défaillant sur une portion d'une trentaine de kilomètres)
Lorsque le jour se lève, cela fait déjà huit heures que l'on court. Cela fait longtemps que je ne mange plus, me nourrissant à la boisson énergétique (Hydrixir Longue Distance sans Gluten). Je bois par contre beaucoup et j'ai l'impression que cela me suffit pour l'instant. Le paysage est beau, j'ai encore des souvenirs très présents de 2014, et je vis comme une petite victoire le fait de dépasser le caillou sur lequel je m'étais arrêtée 10 mn. Le vent se fait de plus en plus violent, au point qu'il est parfois difficile de marcher droit.
Soudain, ma musique s'arrête! Plus de batterie! Quel drame! Je me force alors à ne pas trop penser, ne pas me concentrer sur mon ventre douloureux et mon genou défaillant pour plutôt me laisser nourrir par le paysage.
Au loin, j'aperçois Roque Nueblo, enfin! Je me dis que, une fois là bas, ce sera un jeu d'enfant que de gagner l'arrivée... En fait, une fois enfin arrivée dans ce lieu magique, je vois un panneau qui me plonge presque dans un état dépressif: "META, 50 km".


A ma montre, il est pourtant marqué 81 km! J'ai envie de crier à l'escroquerie: le parcours devait faire 125 km, pas 131! Je me rappelle que je me suis perdue et que j'ai vaguement entendu dire que le parcours faisait plutôt 128 km... tout s'explique.
La traversée vers Garanon est magique.



J'y retrouve Javier, qui m'encourage. Je lui laisse les bâtons, pensant qu'il ne reste presque que des descentes. Mais en fait de descentes, commence une montée courte (400m) mais raide. Je rattrape alors les coureurs du Marathon. L'ambiance est incroyable: ils m'encouragent, me font une haie d'honneur, cela me galvanise. S'ensuit une superbe descente qui aurait dû être juste magique, sauf que mon genou me torture. Je boitille tant bien que mal, et suis obligée de crier des centaines de fois "Pasar", car les coureurs du Marathon sont nombreux et prennent vraiment tout leur temps. 
Un peu plus loin, je débouche sur un sentier pavé, avec de gros boulets irréguliers qui achèvent de me massacrer le genou. A ma grande consternation, je vois des coureurs beaucoup plus bas, et je constate que cette descente est interminable.
Enfin on arrive à Tunte. Il commence à faire chaud, je me trempe la tête dans une bassine et prend le temps de bien boire. L'idée de manger ne m'effleure pas une seconde. Rien que d'y penser, j'ai envie de vomir. S'ensuit une première montée, puis une deuxième. Je suis en train de me dire "Ouf, on en a fini avec les montées", quand je lève la tête et que je vois avec épouvante des coureurs tout en haut, très loin de moi!
Je clopine tant bien que mal, à peu près à la même allure que les gens qui m'entourent, dont on voit tout de suite que ce sont plus des coureurs loisir que des compétiteurs entraînés. L'ambiance est sympa et je suis contente d'être entourée. Je suis toujours un peu surprise que personne ne me revienne dessus car je vais de plus en plus lentement.
A partir de là, je mets ma montre dans mon sac, préférant ne pas me démoraliser en voyant les kilomètres défiler aussi lentement et les heures passer aussi vite. Arrivée au col, je vois un panneau "META, 30 km". Je préfère l'oublier de suite car j'ai du mal à m'imaginer parcourir encore 1 km, alors 30...
La suite devient de plus en plus cauchemardesque, avec des sentiers parfois hyper caillouteux, puis de longues pistes poussiéreuses. Le paysage cesse d'être beau vers le 105eme kilomètre. Je ne pense même plus, me traînant lamentablement dans ce désert. Heureusement, une Espagnole très gaie (et très opulente), court avec moi en chantant à tue-tête. Heureusement qu'elle s'arrête prendre des photos car cela me permet de la suivre un bon moment. Puis elle me dépasse, suivie de 5 coureurs de la TransGranCanaria. Je suis déçue de perdre des places mais incapable d'aller plus vite. J'ai l'impression qu'on me brûle les intestins et le genou droit.
Sur la fin, voyant qu'on enchaîne les kilomètres au fond d'un horrible lit de rivière au sol irrégulier alors qu'un beau trottoir bien lisse longe celui-ci, je commence à marcher en bouillant de colère. Je n'arrive plus à endiguer les pensées négatives que j'ai si longtemps contenues pendant la course. Lorsque, après un dernier détour sur une plage de sable, j'aperçois enfin l'arrivée, je ne suis ni contente, ni émue, juste fatiguée et encore en colère. 
C'est seulement le soir, dans mon lit bien propre, que je commence à ressentir une certaine fierté d'être allée au bout, d'avoir fait un podium sur cette course relevée, et d'avoir lutté contre la douleur et les pensées négatives avec autant de volonté.



Encore un immense merci à tous ceux qui me soutiennent, ma famille et mes amis, bien sûr, mais aussi HOKA ONE ONE (sans ces fabuleuses chaussures je ne serais pas arrivée au bout), le CABB, mon club, OVERSTIMS et COMPEX.